Les candidats ont toujours exprimé leur insatisfaction par rapport aux méthodes de recrutement par annonce : trop subjectives quand l’artisan recruteur sélectionnait après une lecture de tous les CV papiers, trop aléatoires quand les outils automatiques de gestion des candidatures sélectionnent les CV à partir de mots-clés… La démarche Réseau et aujourd’hui les réseaux sociaux numériques offrent la possibilité de rechercher un emploi autrement, et pourtant les candidats ne l’utilisent pas. Ils nous disent même parfois ne pas y penser spontanément…
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Ce que nous disent les candidats
Les candidats restent très attachés à la candidature suite à une annonce d’offre d’emploi.
Ce que nous disent les candidats :
- « l’annonce, c’est la garantie d’un poste à pourvoir, d’une réelle opportunité d’emploi. »
- « l’annonce permet d’orienter ma candidature, de mieux l’argumenter à partir des attentes exprimées. »
- « le recrutement par annonce, c’est plus rapide. »
- « la procédure pour candidater est précisée dans l’annonce, en général une lettre de motivation et un CV. »
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L’annonce répond aux besoins des candidats ?
En dépit des insatisfactions exprimées, les attentes du candidat, les annonces semblent répondre au besoin de sécurité des candidats : des informations précises, des règles à suivre, des normes connues.. Un besoin de repères dans une période où d’autres repères s’effacent par contrainte (perte d’emploi) ou par choix (souhait d’évolution).
Les repères que fournissent les annonces répondent aussi au besoin de se sentir compétent dans sa recherche d’emploi, de bien conduire sa recherche d’emploi en utilisant des méthodes qui, bien que questionnées, perdurent. Une pérennité perçue comme une preuve de leur efficacité. L’annonce, le CV, la lettre de motivation perdurent aussi parce qu’ils apparaissent comme une norme partagée par un collectif composés des autres candidats, et des recruteurs !
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L’annonce, les réseaux sociaux et les besoins des candidats ?
La démarche Réseau dans laquelle s’intègre les réseaux sociaux numériques est généralement perçue comme moins rassurante.
Le candidat projète la démarche comme plus incertaine en termes de résultats. Socialement plus risquée. Socialement moins valorisante aussi (position de demandeur).
La démarche Réseau semble ne pas répondre au besoin de sécurité de la plupart des candidats, l’objectif d’un rendez-vous n’est pas aussi précis que la réponse à une annonce pour un poste. Les modalités sont à réinventer à chaque contact… Les candidats nous disent très souvent ne pas se sentir capables de développer une démarche réseau. Les arguments présentés le plus souvent étant qu’ils n’ont pas de réseau, qu’ils n’ont jamais fait de réseautage, qu’ils n’ont pas appris à le faire, qu’ils n’ont pas de plaisir à l’idée de le faire…
La perception d’une absence de contrôle sur le résultat et d’une absence de contrôle sur le déroulement de la démarche Réseau génèrent une réticence fréquente à l’adopter, à l’expérimenter.
Si on compare la démarche Réseau à la démarche Annonce, le point commun serait objectivement l’absence de contrôle sur le résultat !
La candidature à une annonce est largement soumise à l’évaluation du sélectionneur ou d’un outil, à la décision du recruteur. Les candidats semblent néanmoins davantage envisager la candidature à une annonce et son argumentation (CV, lettre de motivation, entretien) comme un élément d’influence sur le résultat de la sélection. Ce qui est aussi valable pour la démarche Réseau : l’échange permet un ajustement plus pertinent et plus ouvert de l’argumentation, donc une influence plus grande sur le résultat…
L’absence de contrôle sur le déroulement de la démarche Réseau en comparaison de la candidature à une annonce est objectivement valable, l’annonce étant davantage normée que la première. La démarche Réseau relève plutôt de bons réflexes et de pratiques éprouvées que de modes opératoires et règles valables en tout temps et en tout lieu…
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Les trois études conduites en 2012 par Adecco RegionsJob ou IPSOS démontrent la difficulté des réseaux sociaux à s’imposer comme une tendance lourde des pratiques de recherche d’emploi alors qu’ils semblaient répondre aux attentes intrinsèques des candidats pour un recrutement davantage personnalisé et ouvert.
L’annonce semble bénéficier par ses caractéristiques d’un certain pouvoir sur la motivation des individus à l’utiliser parce qu’elle répond à certains de leurs besoins : sécurité, sentiment de compétences, sentiment d’influence… et parce qu’elle est aujourd’hui une norme partagée collectivement.
Elle peut être aussi le signe d’une certaine résignation des candidats…
Nous aborderons dans les prochains jours, les conditions pour une adoption plus large des usages sociaux dans la recherche d’emploi, convaincus de leur efficacité pour les chercheurs d’emploi et pour les recruteurs et de leur meilleure adéquation aux enjeux et aux besoins des salariés et des employeurs. Convaincus qu’ils constituent à ce jour la piste d’innovation la plus contributive à une transformation des pratiques de recrutement y compris par annonce…
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A lire aussi sur le sujet :
Le recrutement aurait-il raté l’opportunité des réseaux sociaux ?
Le dossier : Le recrutement se transforme-t-il ?
Bonsoir Jérôme,
La remarque est juste sur l’utilisation par les recruteurs de l’annonce, qui utilisent par ailleurs également les bases de données y compris celles des réseaux sociaux aujourd’hui et donc l’approche directe… Cet article est relatif à la recherche d’emploi, nous avons prévu traiter le côté Recrutement prochainement.
Bien vu l’idée d’être déjà en conversation sur un réseau social, s’ils redeviennent conversationnels… un usage qui disparait ? ou s’automatise ?
Merci excellentes fêtes également !
Bonsoir Marie-Pierre,
Norme partagée, résignation des candidats, j’ajouterais l’entente cordiale qui règne entre les agences de com. RH et les jobboards me semblent être les ingrédients d’un recours systématique à l’annonce.
On peut aussi ajouter le « pour vivre heureux, vivons cachés » qui permet au candidat de ne pas trop se dévoiler lorsqu’il répond à une annonce…sur un réseau social, il met déjà un pied en interview…
Joyeuses fêtes à toutes et à tous,
Jp
Merci Jean-Christophe pour ton commentaire et les références mentionnées
Hello Marie-Pierre,
Je partage complètement ton analyse ! C’est exactement le discours que je tiens aux étudiants et candidats lors de mes interventions et dans mes billets.
Les candidats préfèrent clairement la sécurité confortable de la réponse aux offres d’emploi à la nécessaire prise de risque que comporte la démarche réseau. Adopter une attitude passive, mais bien connue, est plus rassurant et bien moins engageant que prendre son téléphone…
Tout comme se contenter d’avoir un profil sur Viadeo/Linkedin est plus facile que d’explorer l’extraordinaire potentiel de ces outils et faire preuve de curiosité et d’audace pour passer à l’action !
Et pourtant, entre rester chez soi à se lamenter de ne pas avoir de réponse à ses nombreuses candidatures et prendre son destin en mains en rencontrant des pros pour provoquer les opportunités, il n’y a pas photo !!!
Malheureusement, comme le dit très justement mon ami Hervé Bommelaer, expert Français du Réseau : « le réseau c’est risqué, mais le plus grand risque c’est de ne pas travailler ! », idée qu’il résume ainsi : « Networking or not working ! ». 😉