Voici un extrait d’une interview réalisée au sujet de l’éthique des innovations digitales en RH, des données RH, de la digitalisation des processus RH et Management, des offres des start-up de la RHTech… par Agathe Fonsagrives de la Revue Management & DataScience.

Digitalisation RH, éthique et gestion des risques humains

Que ce soit du côté des start-ups RH Tech ou du côté des organisations, pensez-vous que les éventuels risques humains liés à l’utilisation de ces nouveaux outils digitaux par les salariés font partie des préoccupations ?

Du point de vue des nouveaux outils RH reposant sur les technologies numériques, l’IA et les usages sociaux, on s’attend à ce que la conception et la stratégie de mise en oeuvre anticipent les risques potentiels les plus évidents (sentiment d’inéquités, biais, charges mentales, dématérialisation des relations humaines, mise à distance, traitement et protection des données personnelles, ergonomie, compétences, éthique…).

Les outils et usages digitaux sont censés être « user centric » afin de générer “l’engagement digital” des utilisateurs. Or ce n’est pas toujours le cas pour deux principales raisons :

– Les organisations sont les clients des éditeurs. Certains éditeurs peuvent prioriser les besoins des directions au détriment des individus. Par exemple, les risques humains liés à l’intensité de la charge mentale ou à la diminution des interactions sociales occasionnées par un dispositif technique peuvent ne pas être pris en compte pour privilégier la productivité ou une réduction des coûts… On rencontre ce souci aussi au regard du traitement des données, dans le recrutement par exemple. Cependant après quelques années d’expérimentation du numérique, on observe des progrès dans ce domaine. Des régulations commencent à s’opérer suite à la RGPD ou à la loi PACTE par exemple. Ce qui pousse les éditeurs à prendre en compte ces sujets dès la conception de leur solution.

– A la décharge des éditeurs et des organisations – dans le contexte de réelles innovations – il n’est pas toujours possible d’anticiper tous les risques y compris les risques humains. Ces derniers sont d’autant plus complexes à anticiper que chaque personne est singulière. C’est à l’usage que les problèmes sont constatés et les améliorations identifiées. « On vit une phase de bulle et d’innovation expérimentale » comme l’exprimait justement Olivier Ezratty il y a quelques années.

On va dire que nous apprenons tous collectivement et individuellement en faisant. D’où l’intérêt de démarches participatives et inter-disciplinaires lors de la conception des outils, des usages, et des projets de déploiement.

 

Digitalisation RH et politique RH

Dans quelle mesure les innovations digitales RH sont-elles alignées avec l’idéal de management et la politique sociale de l’entreprise ?

C’est une des questions les plus importantes.

D’une part, la dynamique circulaire de la transformation de l’entreprise – qui ne se résume pas à la digitalisation des processus – n’est pas toujours comprise par les directions et les salariés. D’autre part, la stratégie de transformation numérique est souvent inexistante.

Les entreprises ont encore tendance à adopter des dispositifs techniques sans connaître et comprendre qu’ils induisent des changements majeurs en matière d’organisation, de management, de compétences individuelles et collectives, de modalités de formation, de culture d’entreprise ou de politique RH.

J’essaie toujours de faire passer un message simple aux dirigeants et aux DRH concernant le digital pour les aider dans cette démarche d’appropriation et de projection. Je les invite à passer leur projet au filtre de l’idée suivante « Le digital change principalement deux choses : la gestion de l’information et la gestion des relations ».

Par ailleurs, dans de très nombreuses entreprises quelle que soit la taille, l’idéal de management ou la politique sociale ne sont pas définis ou explicites.

C’est tout l’enjeu de l’élaboration du Projet Humain de l’entreprise qu’en tant qu’ex-DRH je recommande. Le Projet Humain soutient la mise en œuvre de la stratégie de développement autant qu’il contribue à en définir les orientations. Il constitue à la fois un cadre et un cap pour l’action collective et l’action individuelle.

 

Vous pouvez retrouver l’intégralité de l’interview en suivant ce lien : Data, Management & RH