L’engagement des salariés est identifié comme un des freins majeurs à la mise en place effective de l’entreprise collaborative qui doit permettre à l’entreprise de développer et fidéliser sa clientèle, d’innover, de s’adapter.
– Comment mettre en place des pratiques collaboratives contributives à la performance, si les « collaborateurs » ne sont pas motivés à collaborer dans ces nouvelles conditions, ou pas motivés tout court à contribuer activement aux objectifs de l’entreprise ?
– Dans quelles conditions les pratiques collaboratives peuvent-elles accroître l’engagement des salariés ?
– Comme dans l’histoire de la poule et l’oeuf, ne tourne-t-on pas en rond ?
Le terme engagement est très souvent utilisé sans complément, comme si c’était évident.
– Engagé pour quoi ?
– Engagé dans quoi ?
Dans un monde où tout ou presque se redessine, le préciser nous semble essentiel pour tenter de tirer un premier fil de la pelote.
L’engagement pour quoi ?
La notion d’engagement nous semble relever de la même quête que les notions de talent et de performance.
Les compétences et les résultats ne suffisent plus à garantir l’adaptation, l’innovation, la compétitivité, la pérennité de l’entreprise… Il en va de même, de la motivation et de l’implication des salariés dans leur travail, dans leur emploi, dans leur équipe.
Comme le talent est le niveau supérieur de la compétence, la performance celui du résultat, l’engagement est le niveau supérieur de la motivation et de l’implication.
La recherche d’un niveau supérieur de compétences, de performance et de motivation vise un objectif quantitatif de création de valeur dans un environnement complexe et en mouvement. Elle vise aussi un objectif qualitatif : une dynamique adaptative, et donc durable, de création de valeur.
Les directions d’entreprise doivent exprimer plus directement aux salariés ce premier « quoi très business » de l’engagement, plutôt que de se perdre dans un discours « humaniste » peu crédible.
Pour être DANS quelque chose, il faut déjà être POUR !
L’engagement dans quoi ?
L’engagement des salariés pour la compétitivité et la pérennité de l’entreprise dépasse l’implication dans le seul poste de travail, dans l’équipe, dans les missions, dans les objectifs directement confiés. Il va au-delà des engagements pris par la signature du contrat de travail.
Les compléments au terme « engagement » sont les objectifs, la stratégie, les défis de l’entreprise, son projet de développement, en résumé le business de l’entreprise.
L’engagement des salariés sous-entend une connaissance, une compréhension, une adhésion, une implication, une contribution à un objectif plus large que le travail confié dans l’emploi.
C’est probablement le second point d’attention des directions d’entreprise.
Ces dernières souhaitent une implication plus large et plus globale des salariés, tout en maintenant des modes de fonctionnement et de management limitants.
L’évolution vers une structure et un management plus collaboratifs et ouverts, éventuellement inspirés des usages du Web et facilités par les technologies sociales, peut aider à réunir les conditions de cette implication des salariésà une nouvelle échelle.
Mais ces changements organisationnels doivent aussi s’accompagner, mieux encore être précédés, de nouvelles contreparties de la part de l’entreprise, de nouveaux engagements Employeur.
Car c’est aussi dans une relation d’emploi dégradée et dans une nouvelle relation au travail que s’expriment aujourd’hui le besoin des entreprises d’un engagement ++ de la part des salariés, et le besoin des salariés d’être davantage pris en compte, impliqués, entendus, respectés.
Je rejoins la remarque de Luis Suarez en introduction à la conférence sur l’entreprise 2.0 Voir ci-dessous la vidéo de son intervention : Comment mettre en place des pratiques collaboratives qui reposent sur les salariés, quand ces derniers n’ont pas confiance dans l’entreprise, quand le collectif n’existe pas, quand les changements à opérer et les nouveaux apprentissages à faire n’ont pas de sens au sein de l’entreprise ?
Le projet humain d’entreprise pour engager les salariés
Le projet humain de l’entreprise contribue à revaloriser le collectif, à poser les engagements respectifs et les socles d’une nouvelle relation de confiance et d’une nouvelle relation d’emploi.
Une nouvelle relation d’emploi qui a été mise à mal par le désengagement de l’emploi sans contrepartie, par la dégradation des conditions de travail sous la pression des enjeux à court terme, par l’individualisation des parcours et des performances, etc.
Les pratiques sociales peuvent en être une composante. Mais l’essentiel réside dans les contreparties au désengagement de l’emploi. Car quoi qu’on en dise ici et là, pour les jeunes, les talents et tous les autres, la sécurité de l’emploi reste un élément majeur de la motivation et de l’engagement individuel.
Comment les entreprises gèrent-elles, dans ce contexte de défiance et de manque de sens, le paradoxe d’un engagement individuel qui révèle aussi l’intention de rester dans l’entreprise ?
L’engagement externe et interne des salariés
La collaboration peut-elle compenser le désengagement de l’emploi ?
En quoi les nouvelles formes d’organisation, et notamment celles inspirées du web social, aident les entreprises à répondre au besoin de sécurité de l’emploi des salariés ?
Et si l’on part du principe que le besoin de sécurité ne peut plus être assuré, comment peuvent-elles le compenser ou le dépasser pour stimuler l’implication des salariés ou des autres compétences qu’elles mobilisent ponctuellement ?
L’entreprise collaborative vise à importer les schémas relationnels du web social sur l’argument de leur adoption massive par les individus, qui sont par ailleurs ses clients et prospects, ses salariés, ses futurs salariés… Une adoption massive qui l’impacte directement dans son fonctionnement.
L’autre argument repose sur les bénéfices qu’elle constate, notamment en matière de réactivité, de créativité, d’engagement individuel, d’expression des talents, etc. autant de bénéfices que l’entreprise aimerait reprendre à son compte.
Les différences majeures entre l’engagement individuel sur les médias sociaux et l’engagement individuel dans l’entreprise résident dans la finalité de ces communautés respectives.
Et, en corollaire leurs fonctionnements : les premiers ayant favorisé ce que la seconde bridait généralement : partage d’informations et de connaissances, expression et initiative individuelle, identité sociale, opportunités d’apprentissages, etc.
L’entreprise ne peut pas faire du Web social en interne. Elle ne peut que s’en approprier les principes, valeurs et pratiques pour les orienter vers ses objectifs, pour faire évoluer son fonctionnement et sa culture, et créer ainsi les nouvelles conditions d’un plus grand engagement des salariés.
Les pratiques collaboratives ainsi que les nouvelles formes associées d’organisation, de management, de leadership ou d’apprentissages font partie du dispositif, notamment en raison de leur capacité à mixer la dimension collective et individuelle de l’engagement, et à contribuer à l’enjeu d’employabilité et de valorisation individuelle dans un environnement élargi.
Le projet humain de l’entreprise, construit et décliné opérationnellement autour de ses nouveaux principes et valeurs, est un levier d’engagement plus complet. D’autant plus s’il est co-construit avec les salariés. Une première étape pour mettre en place la dynamique d’adaptation continue visée…
Et vous qu’en pensez-vous ?
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