Le cabinet MacKinsey vient de publier une étude sur l’emploi en France en 2020 (en anglais).
La conclusion de l’étude sur les 5 actions prioritaires à conduire pour relever le défi de l’emploi en France d’ici 2020 ne fait pas émerger de nouvelles pistes.
En revanche, les tendances relevées ou projetées méritent note attention.
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Objectifs de création d’emploi
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La réduction du taux de chômage à 5,5% de la population active passe par la création de 240 000 emplois nets par an, soit 2 fois plus d’emplois à créer que la France n’a pu le faire durant les 20 dernières années.
L’étude précise que sur les 40 dernières années, la France a en moyenne créé 150 000 emplois nets par an.
Le niveau de plus de 200 000 emplois nets créés par an n’a été atteint que durant 3 années : 1998, 1999, 2000 (le taux de croissance du PIB variait entre 3,5% et 4% – Analyse économique : croissance en France de 1998 à 2002).
Une des recommandations du rapport est de soutenir la création d’entreprises en renforçant ses 3 socles : l’écosystème, le financement (l’armorçage), la culture (peur d’entreprendre).
Adapter notre système éducatif à l’économie de la connaissance
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Un décalage croissant entre l’offre et la demande sur le marché de l’emploi explique en grande partie le niveau de chômage structurellement élevé.
Selon MacKinsey, il manquerait en France 2020 environ 2,2 millions de salariés qualifiés (guerre des talents)mais aussi 2,3 millions d’emplois pour des salariés faiblement qualifiés.
L’étude pointe une cause majeure de ce décalage croissant : le système éducatif.
Pour les salariés les plus qualifiés, c’est le rythme d’adaptation de notre système éducatif à l’économie de la connaissance qui est insuffisant.
Par ailleurs, trop de jeunes quittent l’école sans qualification.
Les contenus de formation, les faibles liens avec le monde de l’entreprise, l’orientation professionnelle et l’accompagnement seraient les principales raisons d’un système éducatif peu performant en dépit des budgets consacrés.
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Le rapport détaillé (anglais) : French employment 2020
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Bonjour Corinne, merci pour votre commentaire très intéressant.
Si je partage votre analyse sur le risque d’une surqualification qui peut rimer à terme avec déclassement, je crois aussi que les deux points d’attention des entreprises résident dans la définition de leur besoin en compétences à court et moyen terme et dans leur capacité à développer les personnes (formation, mobilité…). Deux enjeux RH fondamentaux !
J’ai souvent abordé le risque d’une politique de recrutement de type « pickup » (recrutement d’une personne toute prête, d’où la guerre des talents) comme une réponse à l’incapacité à former, développer, faire grandir dans l’entreprise… avec toutes ses conséquences sur l’engagement des salariés mais aussi la capitalisation des savoir, le lien social, la culture d’entreprise… la performance directement aussi.
Par ailleurs, le point que vous soulevez pose la question de l’évolution de ces jeunes diplômés et du profil de carrière… dans une entreprise encore très pyramidale ! Quid de l’entreprise de demain ? (voir article sur la Genération Y fera-t-elle le modèle de carrière ?).
Concernant, le système éducatif, je vous rejoins, il sert à former la main d’oeuvre dont l’économie a besoin et dont les personnes ont besoin pour travailler et gagner leur vie. Mais l’Education doit surtout permettre à chacun de construire une vie personnelle (rôle des parents aussi…) et le vivre ensemble (socialisation).
Un grand merci pour le complément de réflexion apporté. Au plaisir de poursuivre cette échange IRL 🙂
Bonne journée.
Je me permets deux remarques au sujet de ces conclusions de McKinsey :
1) Une opérationnelle : le décalage structurel entre l’offre et la demande est bien sûr indéniable.
Pour autant, je constate chaque jour dans le numérique un renforcement culturel, sociologique, de ce décalage, qui consiste en une tendance à la surqualification des recrutements, pour des postes qui sur le terrain ne le justifient pas toujours, voire sont très loin du compte.
Ex. du bac +4 ou +5 ou même 2+ ou +3 souvent attendu, mais parfaitement inutile pour une partie signifiante des emplois de webmaster, trafic manager, chargé de SEO, marketer opérationnel, éditeur, assistant chef de projet, intégrateur, technicien de développement, etc.
En réalité, nombre d’entre elles dessinent de plus en plus l’avenir des « fonctions non / peu qualifiées de l’économie de la connaissance ». Et techniquement, en entreprise, elles se satisfont bien de reposer sur des profils même en deçà du bac, pour peu de quelques jours ou semaines de formation. Mais c’est le regard du dirigeant de PME ou du recruteur qu’il faut parfois parvenir à faire évoluer…
2) Une plus globale : quand on (Mc Kinsey) parle d’un « un système éducatif peu performant en dépit des budgets consacrés », cela revient à analyser le système éducatif à l’aune (quantitative) du seul référentiel de l’économie financière et de l’emploi… Ce qui est très réducteur (voire dangereux) : la mission, les politiques éducatives, sont-elles seulement celles-ci ? Quid de la dimension humaine ? Qu’en pensez-vous ?
Merci pour ce billet, et bien sincèrement.