La perspective d’un cycle démographique favorable à l’emploi des seniors s’est évanouie avec la crise de 2008. Dans le contexte d’un chômage massif 2008/2009 ou de stabilisation de la dégradation 2010, le taux d’emploi des seniors, structurellement faible en France, continue à se dégrader en dépit des obligations légales ou des incitations financières de 2010, essentiellement motivées par ailleurs pour préserver l’équilibre des systèmes de protections sociales.
Si les objectifs à atteindre en matière d’emploi des seniors font l’objet d’un relatif consensus :
- favoriser le maintien dans l’emploi des seniors,
- favoriser le recrutement des seniors,
- améliorer la qualité de vie et la santé au travail.
En revanche, l’évolution des représentations et des pratiques nécessitent du temps. Temps que n’ont pas eu les seniors des années 90 et que n’ont pas non plus les seniors de 2011.
Des générations de seniors sacrifiées : génération de l’après préretraite, de la retraite à 60 ans ou à 67 ans. Les causes sont multiples et la mise en œuvre des solutions en conséquence complexes, entre choix politiques, contextes économiques, évolutions démographiques, aspirations sociales, modèle social des entreprises et pratiques RH …
Du temps pour faire évoluer les représentations des entreprises et des salariés.
Ces représentations sont notamment conditionnées par notre modèle social fondé sur la progression de carrière et donc de salaire, sous entendu pour certains experts par une logique de mérite ou pour d’autres par une logique de compensation avec une juniorité moins rémunérée.
Ce qui conduit, notamment, les entreprises à argumenter sur le coût du travail d’un salarié senior trop élevé en parallèle d’une productivité estimée en baisse, argument qui reste néanmoins à démontrer précisément.
Par ailleurs, les entreprises et salariés sont toujours culturellement imprégnés par la retraite à 60 ans et les préretraites. Les entreprises continuent à limiter l’investissement sur les salariés de plus de 45 ans (mobilité professionnelle, formation …) en se disant qu’elles n’auront pas de retour sur investissement. Et les préretraites existent toujours financés sur les fonds propres des entreprises.
Les salariés eux-mêmes continuent à aspirer à une retraite vers 60 ans pour profiter encore en bonne santé d’une dernière étape de vie sans intégrer psychologiquement la progression de l’espérance de vie et l’amélioration de la santé des personnes les plus âgées. Cette aspiration à quitter l’entreprise est par ailleurs entretenue par la dégradation générale des relations et des conditions de travail dans les entreprises.
Emploi des Seniors : du temps pour transformer les pratiques RH
Pour favoriser le maintien dans l’emploi des seniors, un entretien de seconde partie de carrières a été imposé aux entreprises pour les salariés de plus de 45 ans dans le cadre du Plan senior devant s’intégrer dans la Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Nous pensons que cet entretien sera inefficient pour répondre à l’objectif visé du maintien dans l’entreprise. D’une part, les managers ne sont pas qualifiés et suffisamment préparés pour cet entretien. Les bilans de compétences et des programmes de formation peuvent pleuvoir mais s’ils ne sont pas ni bine orientés, ni exploités, ils ne serviront à rien.
D’autre part, et ce point nous paraît majeur, le paramètre de l’âge qui lui est associé n’est pas pertinent. L’accompagnement des trajectoires professionnelles dans l’entreprise devrait être un processus continu afin d’éviter de constater à 45 ans les voies sans issue ou les déraillements. Il devrait aussi être déconnecté de l’âge pour prendre davantage en compte les compétences et les contributions.
Dès le début de la relation contractuelle, l’entreprise et le salarié devraient se projeter comme 2 partenaires responsables du développement des compétences et de l’animation de la motivation le temps de leur collaboration. Cette collaboration contribuerait à améliorer la performance individuelle et collective, à sécuriser le parcours professionnel du salarié dans l’entreprise et demain sur le marché de l’emploi, quel que soit l’âge. Un dialogue renouvelé entre employeur et salarié sur ces sujets renforcerait par ailleurs le sens de leur collaboration et la clarté de leurs engagements réciproques.
N’est-ce pas là l’engagement Employabilité qui devait se substituer à l’Engagement Emploi ?
Un engagement sur l’employabilité qui viendrait enfin concrétiser une réelle flexi-sécurité.
Une flexi-sécurité effective qui concernerait les salariés de tout âge, au-delà des seniors.
Une flexi-sécurité qui ne serait pas seulement vu à travers des formes contractuelles et un système social de compensation, qui ne parvient plus à l’être, tant le nombre de salariés concernés est croissant.
Une flexi-sécurité conçue comme un partenariat engageant et effectif ?
- Des entreprises impliquées dans l’orientation et la construction des trajectoires professionnelles de leurs salariés, quels que soient l’expérience professionnelle, le statut, le métier, la durée du contrat … en les déléguant partiellement dans les phases les plus expertes.
- Des jeunes formés à la compétence à s’orienter, des salariés davantage conscients des enjeux et pro-actifs, plus agiles dans la gestion de leurs parcours professionnels et de leur employabilité, apte à rebondir si nécessaire …
- Dans une relation non plus d’emploi mais de travail en dynamique qui bénéficie aussi à la performance économique et sociale de l’entreprise,
- Sur un marché du travail, y compris la formation, éduqué à la flexibilité, davantage apte à absorber les évolutions continues des besoins en compétences.
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Le but de la réflexion qui suit n’est surtout pas d’opposer ou de faire s’affronter les jeunes générations avec les séniors mais c’est surtout de faire prendre conscience de l’intérêt de faire travailler ensembles ces deux générations. A vouloir trop faire de jeunisme dans les entreprises, on en arrive à des drames humains telles l’affaire d’OUTREAU où des vies ont été brisées à jamais en raison de l’inexpérience d’un jeune magistrat qui était pourtant bardé de diplômes.
Voici mon point de vue : le gouvernement impose aux salariés l’allongement de la vie professionnelle. Je pense que leur responsabilité est donc de tout mettre en œuvre pour maintenir ou remettre les séniors au travail : pour cela, il ne faut pas que des demi-mesures, soi-disant incitatives, qui ne fonctionnent pas, telles que le CDD SENIOR ou encore la loi de janvier 2010 sur le maintien dans l’emploi des séniors mais de vraies mesures dont les coûts seraient pris en charge par l’état tels que :
Pour les personnes au chômage : la reconversion, afin d’augmenter leur employabilité sur le marché du travail, la formation complémentaire, quand celle-ci est nécessaire afin d’accéder à des diplômes supérieurs qu’ils n’auraient pas pu acquérir dans leur prime jeunesse. Les pôles emplois sont débordés et certains chômeurs ne connaissent absolument pas leurs droits : pourquoi ne pas demander à des anciens DRH à la retraite volontaires basés dans chaque pôle emploi, de renseigner ces personnes sur les façons d’accéder à une formation ou sur la façon de faire un CV, une lettre de motivation, comment se présenter à un entretien …etc.
La France est en queue de peloton pour ce qui est de l’emploi des séniors : Comparé aux pays de l’Union Européenne à 15, le taux d’emploi des 60-64 ans est très faible en France (17,9 % contre 32,5% au niveau européen en 2010). Le taux d’emploi des 55-59 ans est plus proche de la moyenne européenne (60,6% contre 63,5% en 2010), en raison notamment du taux d’activité relativement élevé des femmes. De 2000 à 2010, le taux d’emploi des 55-64 ans a progressé dans la quasi-totalité de ces pays, avec pour la France une progression légèrement inférieure à la moyenne européenne (enquête DARES).
De même, les entreprises ont tout à y gagner en performance car les séniors ont de l’expérience, du recul, de l’habilité acquise et à transmettre aux jeunes générations ; dans un certain nombre de métiers, plus on vieillit, plus on se bonifie ; licencier ou laisser partir les séniors revient à se couper un bras. L’entreprise a également une responsabilité sociétale ; les coûts qu’engendrent un sénior au chômage sont très élevés ; ils se répercutent sur les cotisations et donc sur le coût du travail. Les stéréotypes ont la vie dure : « les séniors ne sont pas mobiles », « les séniors sont trop chers », « les séniors sont mauvais en informatique », « les séniors ne parlent pas anglais », « les séniors ne sont pas réactifs » : bien sûr, certains ont ces défauts mais certains jeunes également ont ces défauts !!!! Les DRH doivent arrêter de juger les séniors au travers de leur âge mais bien au travers de leurs compétences ; je suis d’accord quand vous dites que « les entreprises doivent signer des engagements de résultats et non plus de moyens » ; j’entends autour de moi des témoignages de séniors qui disent « j’aimerais bien faire telle formation, mais on me dit que je suis trop âgée, que je vais partir à la retraite !!!! le comble !!!
Car, messieurs les employeurs, sachez que tout employé jeune a le droit de démissionner pour aller voir ailleurs même s’il a eu une formation. En matière de rémunération, certains séniors préfèrent, en fin de carrière, travailler à mi-temps pour passer un peu plus de temps à leurs loisirs, à leurs familles ; alors pourquoi ne pas leur proposer cette alternative ? Quant à l’anglais, ce n’est pas un mal propre aux séniors mais bien un mal franco-français qui est du au système éducatif français !!!
L’état doit être arbitre vigilant et mettre tout en œuvre pour faire avancer le mammouth !!!