Les salariés ambassadeurs est le terme utilisé pour désigner les salariés qui représentent leur entreprise. La soutiennent, la relaient, la promeuvent… notamment sur les réseaux sociaux.
L’expression de salariés ambassadeurs est facile à communiquer et à comprendre. En revanche, la mise en oeuvre d’une politique de salariés ambassadeurs et d’une stratégie pose actuellement de nombreuses questions aux entreprises et aux salariés.
C’est sous cet angle, le point de vue des salariés, que nous avons choisi de traiter le sujet dans cette série d’articles :
- Salariés ambassadeurs : est-ce le bon terme ?
- Comment devient-on des salariés ambassadeurs de l’entreprise ?
- Est-on ambassadeur au titre de sa fonction ?
- Est-on sans le savoir un salarié ambassadeur de son entreprise ?
- Quels sont les impacts éventuels sur le contrat de travail, le poste et les missions, l’évaluation de son travail et de ses contributions ?
- Comment se présenter sur les réseaux sociaux ?
- Non désigné par l’entreprise, peut-on néanmoins communiquer sur elle ? Quelles en sont les avantages et les inconvénients à titre individuel ?
- Quels sont les impacts des changements qui interviennent : changement de poste, de fonction, d’entreprise… ?
Autant de questions du côté des salariés qui touchent aux motivations, aux compétences, aux relations avec son employeur ou au droit du travail…
Nous aborderons les salariés ambassadeurs sous l’angle du recrutement, des RH et de la marque employeur. Ces questions sont aussi valables pour d’autres domaines comme le marketing, le commercial, la production, la R&D pour lesquels les entreprises peuvent avoir un intérêt à s’appuyer sur leurs salariés.
Les salariés ambassadeurs : le bon terme ?
Personnellement, je ne suis pas fan depuis longtemps de l’expression « salariés ambassadeurs ». Elle englobe des réalités diverses, tant du point de vue des employeurs que des salariés.
Selon Wikipedia, l’ambassadeur :
- est le représentant désigné d’un gouvernement,
- tient son pouvoir d’un gouvernement et ne l’exerce qu’en son nom,
- doit défendre les intérêts de son pays,
- se tient au courant de la situation locale et en informe son gouvernement,
est chargé de développer des relations, - peut garder le titre d’Ambassadeur de France toute sa vie ou ne l’avoir que pour la durée de sa mission.
Au sens figuré, un ambassadeur est une personne en charge d’une mission ou d’un message.
Les salariés seraient des ambassadeurs de l’entreprise si :
– ils sont désignés par l’entreprise pour la représenter sur les réseaux sociaux. Cela peut-être aussi off line. En matière de recrutement, il peut aussi s’agir de journées carrières sur des campus d’écoles ou d’universités, des conférence, des cours, etc.).
– ils ont des prérogatives au titre de cette mission dans le cadre de la politique ou de la stratégie définie par l’entreprise.
– ils doivent défendre les intérêts de l’entreprise,
– ils réalisent une veille et remontent des informations auprès de l’entreprise,
– ils développent des relations avec d’autres personnes ou d’autres organisations, et peuvent être à l’origine de partenariats avec l’entreprise
Le terme de salariés ambassadeurs de l’entreprise désignerait donc : une mission et des responsabilités bien définies, répondant à des objectifs et des modalités établis par l’entreprise, relevant de la communication, de la promotion, de l’animation de relations, de coopérations ou de partenariat, de la veille d’informations.
Passons au filtre de cette définition de l’ambassadeur les différentes situations qui se présentent concrètement pour les salariés dans l’entreprise. N’hésitez pas à compléter la liste de vos expériences.
Le métier de community manager
A temps plein, ou à temps partiel en complément d’un autre métier, le métier de community manager répond à la définition de l’ambassadeur.
La mission fait (généralement) l’objet du contrat de travail et/ou de la définition de fonction. Les activités développées par ces salariés s’inscrivent dans la stratégie digitale de l’entreprise, un plan d’actions et des modalités marketing et communication définis, et une marge de manoeuvre pour s’adapter au terrain. Même si cela n’a pas été toujours le cas, le métier de community manager s’est aujourd’hui beaucoup professionnalisé, après une période expérimentale…
Pour les salariés dont la mission principale relève d’un autre métier
Je relève 4 situations :
– Les salariés ambassadeurs au titre de leur mission.
Le métier du salarié induit l’utilisation des réseaux sociaux dans le cadre de la politique digitale de l’entreprise. C’est la cas par exemple des recruteurs, des commerciaux, des marketeurs. Les réseaux sociaux sont à la fois un outil de travail et un espace dans lequel ils représentent leur entreprise selon des modalités définies : cibles précisées, présentation de leur profil, ligne éditoriale, etc. La formation par l’entreprise à l’utilisation des médias sociaux et à sa politique, un accompagnement et une collaboration étroite avec le service leader du digital dans l’entreprise sont nécessaires. L’appréciation de la performance de ses salariés tient compte de leurs activités et des résultats obtenus dans leur poste, notamment via les médias sociaux mais pas que, et avec le soutien de l’entreprise.
– Les salariés ambassadeurs au titre de leur statut de salarié de l’entreprise.
Ils sont choisis, désignés en raison de leurs compétences et de leur intérêt pour les médias sociaux. Cette stratégie est directement liée au modèle économique du 2.0 où les internautes et aussi les salariés de l’entreprise contribuent aux processus de l’entreprise pour créer une valeur ajoutée additionnelle.
Dans cette catégorie, on trouvera aussi des salariés ambassadeurs que l’entreprise veut rendre visibles pour soutenir son image, sa notoriété, sa communication, ses actions en raison de leur fonction, de leur expertise métier en dehors même de leurs aptitudes ou goûts à le faire. Le dirigeant de l’entreprise, les cadres dirigeants, les experts techniques ou le manager d’une activité coeur de métier sont souvent sollicités dans ce cas de figure pour représenter la marque. On y trouve aussi des DRH…
Leur mission n’est pas toujours formalisée, et leur contribution appréciée, évaluée, reconnue. Elle devrait l’être. Elle est davantage qualitative.
Ils sont formés ou à minima briefés à l’utilisation des réseaux sociaux et aux objectifs visés par l’entreprise.
La qualité de leur présence peut être très mécanique et diplomatique, reprise d’informations poussées par l’entreprise et « like ou retweet » à souhait.
Ou au contraire une présence et une voix très inspirée par leur propre personnalité et donc remarquable et impactante.
– Les salariés supporters de l’entreprise, le volontariat.
Les entreprises peuvent demander à leurs salariés, sur la base du volontariat et à partir de leur compte personnel, de relayer des informations précises auprès de leur réseau. Une offre d’emploi par exemple.
Les salariés qui l’acceptent sont davantage des salariés supporters de l’entreprise.
Prêts à rendre service ou plus impliqués que la moyenne, ils expriment à travers ce volontariat leur soutien à l’entreprise, la compréhension aux enjeux, leur adhésion aux valeurs… Cette contribution volontaire peut aussi relever d’une stratégie plus personnelle, se faire bien voir par son employeur…
Très souvent, les consignes données, le suivi et la reconnaissance des salariés supporters sont minimales. Les entreprises auraient cependant tout intérêt pour ses enjeux externes ET internes ! à développer une vraie politique auprès de ces salariés supporters. Ils pourraient être leurs futurs ambassadeurs dans le cadre d’une stratégie digitale qui monte en puissance.
Pour les entreprises (et il y en a…) qui exigent de tous leurs salariés une présence sociale, mobilisant les comptes existants ou obligeant à en créer un, avec mention de l’entreprise sur le profil social, et un relai presque systématique des communications, on ne peut pas parler de salariés supporters ni de salariés ambassadeurs.
Il s’agit davantage d’une armée, avec des salariés soldats du digital, difficiles à manager, avec des impacts souvent faibles ou contreproductifs. Une stratégie du nombre déconseillée en termes d’image, de crédibilité, d’efficacité et très risquée en matière de réputation…
– Les salariés représentants de fait de l’entreprise.
Ces salariés ne sont pas des ambassadeurs de leur entreprise car ils ne sont pas désignés, mandatés par l’entreprise.
Parfois, c’est leur métier qui les conduit à utiliser les réseaux sociaux à titre professionnel mais individuel. Dans la période d’adoption progressive des médias sociaux, de nombreux salariés se positionnent sur les réseaux sociaux, les expérimentent et les utilisent professionnellement en l’absence de politique et de stratégie de l’entreprise en la matière. Dans le recrutement, il est courant que les salariés en charge du recrutement utilisent leur compte personnel pour faire du sourcing à leur seul initiative.
Ces salariés deviennent des Représentants de fait de leur entreprise. Ni les employeurs, ni eux-mêmes n’en ont pleinement conscience.
Cette situation conduit souvent à un imbroglio pro et perso pour ces salariés.
Ils ont souvent initié leur compte et leur présence sur des motivations et relations personnelles. Puis ils les détournent sur des objectifs professionnels.
Au bout d’un moment, ils ne savent plus quelle stratégie adoptée. Ils n’identifient aucune valeur ajoutée pour eux-mêmes ou pour leur travail.
Quant aux salariés qui créent un compte sur un réseau social avec l’objectif premier de l’utiliser professionnellement et à titre individuel, ils s’en détournent très souvent. Ils les trouvent inefficaces et ne mesurent pas le nécessaire soutien de la Marque de l’entreprise pour obtenir des résultats dans un océan de données, d’informations et d’interlocuteurs…
Dans d’autres cas (très courants), la présence sur les réseaux sociaux de ces salariés se veut exclusivement personnelle. Sur un média social comme Twitter, ils choisissent néanmoins de mentionner le nom de leur l’entreprise. Même s’ils ne parlent jamais de leur entreprise, ils contribuent à sa visibilité. Ils représentent leur entreprise involontairement et influencent de fait son image et sa réputation. Il en est de même sur des réseaux sociaux professionnels comme LinkedIn ou Viadeo.
Lorsque les salariés optent pour un CV détaillé sur leur profil social, ils mentionnent leur appartenance à l’entreprise. Sans toujours avoir conscience que cette mention les rend représentants involontaires de leur entreprise, même s’ils sont neutres, passifs, muets… Les CV et profils sociaux : les ambassadeurs silencieux de votre marque employeur sur le blog Canden RH, orienté entreprises.
Dans tous les cas cités, il convient de préciser les droits et devoirs liés à ce statut d’ambassadeurs ou pseudo ambassadeurs de l’entreprise et à en mesurer les impacts individuels et collectifs. Les salariés comme les employeurs ont un intérêt à le faire.
Quel que soit l’objectif, qu’il s’agisse d’une personne individuellement ou d’une organisation, une stratégie digitale ne peut être ni artisanale, ni industrielle. C’est toute la subtilité du fonctionnement en réseau.
Nous aborderons dans le prochain article sur les salariés « ambassadeurs « de l’entreprise sur les réseaux sociaux nos recommandations au regard de la gestion de carrière et du droit du travail en fonction de chaque situation : salariés ambassadeurs, salariés supporters, salariés représentants de fait.
Salariés ambassadeurs sur les réseaux sociaux : les questions à se poser (2)
Salariés ambassadeurs sur les réseaux sociaux : quels avantage pour sa carrière (3)