Les pratiques collaboratives développées sur le web ont bien logiquement questionné les pratiques de collaboration dans les organisations.
Ces dernières se caractérisent majoritairement aujourd’hui par :
- un pouvoir fortement personnalisé,
- un management hiérarchique,
- des processus de travail non partagés ou imposés,
- une appréciation individualisée de la performance,
- le manque de reconnaissance des individus et des collectifs,
- une méfiance face à la relation incertaine d’emploi…
Des éléments qui nuisent à la capacité et à l’envie de collaborer pour une majorité de salariés, quel que soit leur position dans l’entreprise. Des éléments qui paralysent le dispositif collaboratif dans l’organisation, à un moment ou à un autre.
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La graine et le fruit : les réseaux sociaux d’entreprise
Comme l’explique Anthony Poncier dans son livre « les réseaux sociaux d’entreprise » publié par Diateino dans la nouvelle collection « 101 Questions », la condition essentielle à la réussite de la mise en place d’un réseau social interne à l’entreprise nécessite de repenser, avec un vrai nouveau regard, les processus, les relations, les valeurs, les règles du jeu de l’entreprise…
Anthony Poncier aborde de façon très volontariste, on pourrait dire managériale, la mise en place des réseaux sociaux en entreprise :
- amener les collaborateurs à « dépasser les compétitions internes et faire confiance à ses pairs, ses supérieurs, ses subordonnées »;
- « il faut impliquer le management de proximité » ,
- « le collaborateur va pouvoir développer son réseau personnel et son e-réputation au sein de son entreprise »,
- « la possibilité de renforcer la reconnaissance de son travail par un système plus transparent constitue un avantage considérable pour la carrière de chacun »…
- « Auparavant, dans la majorité des cas, les collaborateurs avaient davantage à perdre qu’à gagner en partageant. Il va falloir changer ses représentations »
- « Il faut démontrer les gains de ces dispositifs (aux collaborateurs) et faire en sorte qu’ils aient confiance dans le management, l’organisation, mais aussi dans leurs pairs »
Anthony Poncier perçoit à juste titre le réseau social interne comme une graine qui favorisera, stimulera, structurera… les pratiques collaboratives dans les organisations.
L’entreprise organisée autour de ces usages collaboratifs, plus fluide, plus ouverte… en est le fruit.
L’entreprise 2.0 plus innovante, plus motivante, plus épanouissante, plus valorisante et théoriquement plus valorisée (€).
On peut même imaginer un cercle vertueux où l’entreprise collaborative réinvente sans cesse la collaboration, autre sujet…
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Le terreau…
La culture de certaines entreprises, l’influence d’acteurs internes curieux et enthousiastes des apports des réseaux sociaux dans une visée organisationnelle ou plus business, les ont conduites à expérimenter en interne les pratiques des réseaux sociaux.
Néanmoins l’interrogation d’un grand nombre de directions d’entreprises nous semble relever du passage d’un mode de fonctionnement à un autre.
Une transformation culturelle avec un enjeu clé : « rétablir la confiance avec les salariés et recréer de l’engagement ».
Une transformation organisationnelle qui touche autant le management que les processus de travail et les outils de pilotage.
Deux transformations qui doivent être parfaitement alignées pour être crédibles et engageantes pour les salariés. Chacune d’elle comportant par ailleurs une dimension politique et opérationnelle, sur laquelle les entreprises font généralement le grand écart…
En d’autres termes, le terreau pour mettre en place des pratiques collaboratives ne doit pas être trop appauvri. Pour le moins faudra t-il mettre de l’engrais… le signe crédible d’une évolution annoncée.
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La collaboration implique la confiance. Or la confiance se gagne lorsque les règles du « jeu » sont équitables, transparentes, explicites et effectives.
Changer les règles et les valeurs d’une organisation dans un contexte de « confiance ébranlée » sera assimilé à une communication d’intention et ne fera qu’accroître le manque de confiance.
Les directions d’entreprises devront concrètement expliciter les motivations de la transformation, donner du sens, un premier contenu, des premières actions. Pour définir les motivations et les mettre en actions, même expérimentales, rien de mieux que « montrer patte blanche » en mettant en oeuvre un processus participatif dans l’ensemble de l’entreprise pour construire le projet d’entreprise collaborative avec les salariés.
Une façon efficace d’enrichir le terreau et de commencer à planter les graines !
Merci Yves pour ce partage d’expérience québécois qui explique peut-être l’utilisation du terme « subalterne » qui n’est plus beaucoup employé en France et qui revêt ici une connotation plutôt négative.
À titre d’exemple concret.
Certaines entreprises transfèrent aussi dans leur réseau social des processus de gestion tels que la gestion du rendement, la gestion des activités de formation ainsi que certains aspects de la gestion disciplinaire. En effet, en créant des groupes restreints pour mon unité, par exemple. Je peux féliciter un subalterne de manière publique et ramener à l’ordre un autre en lui faisant parvenir, de manière privée, un rappel à l’ordre pour un écart de conduite, par exemple.
Le gestionnaire peut faire un petit sondage sur les besoins de formation dans son équipe. Des questions lui permettant de mettre en lumière des lacunes de compétences floues devraient lui être fournies par l’équipe de gestion des ressources humaines. C’est aussi cette direction qui devra s’assurer que les échanges en matière de gestion du rendement ont lieu.
Dans un tel contexte, le réseau social permet une multiplication des moyens de communication ainsi qu’une plus grande flexibilité. Avec un tel outil, un gestionnaire peut mieux gérer une équipe délocalisée.
Merci Sylvaine pour ton commentaire.
Je suis moins stricte que toi sur la nature des initiatives de changement, les salariés portent aussi l’innovation, certains sont des influenceurs de haut vol dans les organisations ! D’où l’intérêt (parmi d’autres très bien décrits par Anthony Poncier) d’un espace d’expression et de collaboration plus ouvert comme un réseau social…
La confiance est effectivement un des éléments du bien-être au travail…
Merci Anthony et bravo à toi pour le travail de clarification et de vulgarisation.
Bravo aussi à Diateino et Jean-Noël Chaintreuil, directeur de la collection, pour l’idée du format qui est à mon avis très pratique pour un décideur ou un salarié qui veut s’informer sur le sujet, comprendre.
J’ai particulièrement apprécié les retours d’expérience Lecko et les témoignages.
Merci beaucoup pour ce jolie papier Marie-Pierre,
j’aime beaucoup le titre de l’article et l’analyse qui en découle
A très vite
Bonjour Marie-Pierre
Synchronicité quand tu nous tiens… ton billet correspond largement aux attentes des diplômés des grandes écoles, concernant les dirigeants d’entreprise de demain, selon l’étude menée par le GEF, qui fait l’objet d’un billet sur mon blog… ce matin;))
C’est d’ailleurs sans doute bien des dirigeants que nous pouvons attendre ces changements, plutôt que d’en espérer une application « par le bas » qui commencerait au niveau des managers.
D’autre part, il est intéressant de constater que le « terreau fertile » nécessaire à la réussite d’un réseau social d’entreprise soit tout simplement celui… du bien-être au travail. A l’évidence, on collabore mieux quand on est heureux^^