La clause de mobilité a fait l’objet d’une jurisprudence abondante, eu égard à sa nature souvent contraignante pour le salarié et aux usages parfois détournés des entreprises.
La Cour de Cassation en a donc limité les contours, notamment à travers les arrêts du 14 octobre 2008 et du 13 janvier 2009, marquant une réelle évolution au niveau de la jurisprudence. Cette évolution vient également sanctionner les entreprises qui concevaient des clauses faites pour être refusées entraînant dans la foulée un licenciement.
Définition de la clause de mobilité
La clause de mobilité géographique est une clause par laquelle un salarié consent, par avance, à changer de secteur géographique.
Le contrat de travail définit ainsi le lieu de travail du salarié, mais stipule également que celui-ci pourra être modifié par l’employeur, selon les nécessités de l’entreprise.
Remarque : Il faut bien différencier le changement de lieu de travail pour une longue période et les déplacements occasionnels engendrés par la fonction. Ces derniers ne relèvent pas d’une clause de mobilité mais de l’exécution normale du contrat de travail.
Conditions d’application de la clause de mobilité
La clause de mobilité nécessite l’accord du salarié. Sauf dispositions conventionnelles contraires, la clause de mobilité doit être prévue dans le contrat de travail signé par le salarié. A défaut, un avenant au contrat de travail signé par le salarié doit être ajouté au contrat.
Ceci implique également que les clauses de mobilité issues de conventions collectives doivent avoir été portées à la connaissance du salarié au moment de son embauche et qu’il ait été en mesure d’en prendre connaissance.
Dans le cas où le salarié est embauché préalablement à l’inclusion d’une clause de mobilité dans la convention collective dont il dépend, celle-ci ne lui sera opposable qu’après son acceptation.
Remarque : Les conditions d’application de la clause de mobilité, telles que définies par les derniers arrêts de la Cour de Cassation, limitent fortement l’incorporation de clauses de mobilité dans les conventions collectives.
La clause de mobilité doit être rédigée clairement et définir précisément la zone géographique d’application.
La notion de clarté est applicable à toutes les clauses inclues dans un contrat de travail. Cependant, les derniers arrêts de la Cour de Cassation précisent que la clause de mobilité doit définir de façon précise la zone géographique d’application.
L’employeur ne peut donc plus modifier unilatéralement la portée géographique de la clause de mobilité, ni inclure des notions trop vagues telles que « les zones où est implantée la société ». Celles-ci peuvent changer et une telle clause n’est donc pas valable.
Remarque : la notion de « zone géographique » n’est pas précisément définie par la Cour de Cassation, si bien qu’elle peut s’apprécier en fonction de la région où travaille le salarié, et notamment des transports qui s’y trouvent.
La clause de mobilité ne doit pas entraîner de modifications d’éléments essentiels du contrat de travail.
La clause de mobilité géographique renvoi à deux notions essentielles définies par la directive du 14 octobre 1991 :
- Les modifications des conditions de travail du salarié. Ces modifications relèvent du pouvoir de direction de l’employeur et ne nécessitent pas l’accord du salarié.
- Les modifications d’éléments essentiels du contrat de travail du salarié (article 2 e la Directive). Dans ce cas, toute modification doit faire l’objet d’un avenant au contrat de travail qui sera préalablement soumis à acceptation par le salarié.
Cette notion est non seulement opposable à la clause de mobilité, mais également aux conséquences de son application. Ainsi, la mise en œuvre de la clause de mobilité ne doit pas engendrer de modification de la rémunération, un changement d’horaires de jour en horaires de nuit (ou inversement),… sans l’accord préalable du salarié.
A noter que lorsqu’elle est initialement prévue au contrat, la mutation d’un salarié d’un lieu de travail à un autre constitue un simple changement dans les conditions de travail du salarié.
A l’inverse, si une telle clause n’est pas mentionnée dans le contrat de travail, son application constituera une modification du contrat et nécessitera donc l’accord du salarié et la rédaction d’un avenant au contrat de travail.
La clause de mobilité ne doit pas être mise en œuvre de manière abusive ou déloyale par l’employeur.
La mobilité doit être effectuée dans l’intérêt de l’entreprise et ne doit pas être détournée de son objet. Elle ne peut donc pas, par exemple, sanctionner une faute d’un salarié.
Les arrêts de la Cour de Cassation ont ajouté la notion de proportionnalité de la clause de mobilité, se référant à l’article L. 1121-1 du Code du travail, qui précise que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché« . Ainsi, la mobilité doit être proportionnée aux intérêts de l’entreprise et raisonnable par rapport aux fonctions du salarié.
Un délai de prévenance raisonnable doit également être garanti au salarié. Ce délai s’apprécie au cas par cas en fonction de la situation du salarié.
Remarque : la bonne foi de l’entreprise étant présumée, la charge de la preuve incombe au salarié en cas de litige.
La clause de mobilité ne doit pas porter atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié.
La clause de mobilité doit être proportionnée entre l’intérêt de l’entreprise et les contraintes qu’elle engendre pour le salarié. S’appuyant sur le « droit du salarié à une vie personnelle et familiale », la Cour de Cassation inclue la notion d’évolution de la vie privée. Ainsi, une clause de mobilité conclue à un certain moment de la vie pourra devenir inopposable au salarié suivant l’évolution de ses contraintes familiales.
Refus du salarié
Le salarié qui refuse la modification de son lieu de travail en application d’une clause de mobilité commet, sauf non-respect par l’employeur d’une des clauses ci-dessus mentionnées, un manquement à ses obligations contractuelles.
Le refus du salarié n’entraîne pas, à lui seul, la rupture du contrat mais constitue une faute professionnelle que l’employeur peut sanctionner éventuellement par un licenciement, et le cas échéant par un licenciement pour faute grave.